La lionne Adamson
J’étais de mauvaise humeur ! Marre de mon chez moi, de mes murs trop blancs, de mes pièces exiguës, de mes fenêtres mouchoir de poche, de la vue sur les voisins, de mon ficus qui tirait la gueule, de la rue toute grise, du vent froid horripilant et du pauvre pigeon sur le toit… ouais… rrrourrou ! on avait compris !
Une envie d’ailleurs, de vie sauvage. Je positionnai devant moi quelques papiers aux textures brutes, du recyclé à la mode et des vieilles pages de revues anciennes. J’avais repéré la photo de cette lionne dans un très vieux magazine datant des années 50. Elle avait l’air détendue, heureuse. Une lionne sur un transat. Je creusai le sujet et me plongeai dans une histoire passionnante, loin de mon petit quotidien merdique, de mes habitudes si égocentriques, j’ouvrai mes sens à de vraies questions éthiques…
C’était un article sur la vie d’une lionne en Afrique de l’Est élevée par un garde-forestier et sa femme, la lionne Adamson. Je regrettais de ne pas avoir conservé le documentaire en entier, j’avais même perdu la page de garde de la revue. Voici ce que cela racontait mot pour mot,
extrait de l’article :
[La petite orpheline nourrie par les hommes ignorait la cruauté] Les trois premières années, Elsa mène la vie tranquille d’un bon chien de chasse : choyée par ses maîtres, elle se contente de rapporter le gibier abattu. Elle ne tue jamais : elle n’a pas encore appris. Elle est l’amie de toutes les bêtes, surtout des soixante girafes réticulées qui rôdent autour de la villa. Ses seuls ennemis sont les lions, ses frères, et les éléphantes qui craignent pour leurs petits. De longues heures, au sommet d’un rocher, elle regarde le soleil descendre sur la brousse.
[Adolescente elle suivait ses maîtres comme un gros chat] Elsa a grandi. Elle pèse 140 kilos. Ses griffes et ses crocs sont redoutables, mais elle ne le sait pas encore. Elle est de toutes les sorties de chasse, de tous les safaris. Avec George Adamson et le boy Mukedde, elle traque les fauves mangeurs d’hommes qui terrorisent les tribus. Elle va aussi en vacances sur la plage au bord de l’océan indien où elle passe de longues heures couchée aux pieds de ses maîtres. Pour tous ses déplacements, elle a choisi sa place : le toit de la Land-Rover.
Mais la lionne Adamson, adulte devenait au printemps d’une nervosité qui la rendait intenable. Les Adamson décident de la rendre à la brousse. Mais pour survivre elle ne sait pas tuer. Il faut lui enseigner à dépecer un cadavre, achever le gibier blessé, attaquer enfin. Elsa découvre les points qui permettent d’étouffer un animal. Un jour, elle saute dans la rivière sur le dos d’un buffle, lui maintient la tête dans l’eau jusqu’à l’asphyxie. Elle est féroce. Elle peut affronter la liberté.
La lionne Adamson
Elsa, la lionne Adamson, orpheline du Kenya, prise en charge par George et Joy, avait bouleversé la terre entière. Dans les années 60, le film Born Free (vivre libre – 1966) reprenait le livre de Joy Adamson et raflait 7 récompenses par son impact viscéral et troublant. Pour la première fois il était possible d’aimer un lion. Jusque là les pauvres bêtes étaient considérées comme des trophées de chasse. C’était les vrais débuts de l’activisme pour sauver les lions, un combat déterminant pour empêcher leur mise en captivité ou tout simplement qu’on ne les tue pour le plaisir.
George Adamson vouera sa vie à la protection des lions à une époque où on les considère comme une nuisance et anticipera la plupart des problèmes que nous rencontrons aujourd’hui. Dans les annèes 1980, il avait ainsi écrit :
On qualifie souvent notre travail de perte de temps et d’énergie, les lions n’étant pas une espèce en voie de disparition. C’est exact aujourd’hui mais c’est un raisonnement dangereux à long terme. La même chose a sans doute était dite des rhinocéros il y a dix ans.
Au travers des mots de ses journaux et livres, nous pouvons suivre les pensées d’un homme profond qui aura inspiré tout ceux qui l’ont rencontré.
Des films et reportages ont été réalisés sur ce sujet depuis, avec plus ou moins d’images d’origine, celui-ci est très touchant, un superbe documentaire : Elsa la lionne qui a changé le monde à voir.
Encore bouleversée, oscillant entre tristesse et admiration, je cherchai la connexion entre la vie de cette lionne, mes rêves d’exotisme et cette forme de liberté sauvage incroyable. Je puisai dans mon idéal coloré, tentant de changer le monde à coup de fleurs mais à quoi bon, la vérité était tout autre. Une ombre sombre vint planer sur l’explosion de couleurs. Les palmiers s’assombrirent. Les fleurs se fanant inexorablement. Il était temps que le perroquet s’échappe.
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