La plus belle des randonnées des Gorges du Verdon mais aussi la plus difficile…
Le sentier de l’Imbut et la remontée Vidal
Sachez que le sentier de l’Imbut est le plus spectaculaire et le plus technique des itinéraires des Gorges du Verdon.
Je veux descendre, voir de plus près ce joyau qui brille entre les cailloux gris. Le Verdon semble inaccessible d’ici mais en se rapprochant de l’auberge des Cavaliers, il y a un sentier qui s’enfonce dans la forêt. Il fait déjà chaud, le soleil se joue de notre peau toute pâle. On avance sur une dalle qui expose ses lignes de vie, elle relate des centaines de milliers d’années et les chaussures de randonnée nous laissent apprécier sans difficultés les anfractuosités de la pierre, les impacts, tout ce qui fait trace des tempêtes, des pluies, des sécheresses, et même du passage de l’Homme.
La descente dans les Gorges du Verdon
On domine quelques instants les Gorges du Verdon avec pourtant une sensation de soumission. Tant de grandeur, ça déséquilibre un peu. La descente se fait sous les arbres, une forêt dense et basse qui nous plonge dans l’ombre, nous enveloppe et nous attire en son cœur. L’odeur des chênes verts, un peu acidulée, se mêle à celle des sous-bois : des feuilles mouillées et de la terre. On ressent déjà la fraîcheur de l’eau, ça tombe bien, les muscles commençaient à s’échauffer dans cet enchaînement de lacets. Je reconnais le virage là et l’échelle ici. Ce n’est pas comme si c’était la première fois dans ce canyon.
Et pourtant si, l’arrivée au bord de l’eau crée en moi une décharge, un petit court-circuit qui me permet de m’émerveiller naïvement, sans aucune lassitude. Un peu comme l’ardoise magique des gamins, mes souvenirs sont effacés d’un coup d’un seul pour faire place à la magie du nouveau. Je n’ai jamais vu une eau d’un tel bleu, non jamais !
Et au milieu coule le Verdon
En bas, personne. Ils ont dû oublier ce lieu aussi…
Nous voilà ainsi, à la perpendiculaire de la rivière et il semble que l’on peut la longer dans les deux sens sur plusieurs mètres. Des langues de cailloux entourées d’eau simulent des îlots, quelques arbres à l’ombre légère et mouvante se laissent chahuter par la brise.
La végétation est abondante mais laisse place à des plages de galets blancs. En s’approchant, on distingue que la boue blanchit les pierres cendrées du lit de la rivière. C’est ce qui donne cette couleur particulière au Verdon : cette alternance de gris et de blanc et toute la nature se profilant dans les reflets azurés.
L’agitation du rapide est contenue voire camouflée par l’apparente surface lisse. La supercherie est dévoilée à la première branche rencontrée ou à ce bloc de pierre indétrônable.
Ça fait un petit moment qu’on s’est posé là, à l’abri des arbres, pour guetter la vie du canyon et déguster ce moment rare. Finalement, rejoindre le fond des gorges du Verdon n’aura pas été long ni compliqué.
Entre Martel et Imbut mon cœur balance
Il y a là un panneau avec un plan qui nous situe : deux possibilités. On peut prendre la passerelle de l’Estellier et continuer en face sur le sentier Martel. C’est le chemin de randonnée le plus connu du Verdon. Normalement, il se prend en son départ de l’autre côté de la vallée. Il est possible d’y accéder, en voiture ou navette, en passant par Moustiers en direction de Castellane : la route des crêtes, vertigineuse. La rando est mythique mais très fréquentée, même s’il y a des passages dans des escaliers assez raides, c’est suffisamment équipé et ça reste accessible pour des randonneurs moyennement expérimentés. Il faut juste compter un dénivelé de 600m pour rejoindre le chalet de la Maline ou le Point Sublime. Ce nom est évocateur et attirant. C’est en effet une des plus belles randonnées des gorges du Verdon.
Le sentier de l’Imbut
Mais comme toujours, je suis en recherche de l’autre destination, de celle plus discrète, plus sauvage. Pourtant je redoute un peu le sentier de l’Imbut et surtout la remontée par le sentier Vidal. Ces chemins ont la réputation de faire la vie dure aux randonneurs du dimanche. Il faut s’y aventurer avec les tripes pour ne pas y laisser des plumes. Comme pour nous prévenir, au niveau du pont, la rivière est devenue torrent. On fait le choix de rester en son bord, elle est puissante et violente et nous racole de son tumulte. Elle en fait des tonnes pour qu’on la suive, et ça fonctionne. Mes yeux ne la quittent plus, elle a l’air joueur. Parfois survoltée, elle empoigne les blocs de pierre, les frappe de son écume, tournoie, roule, vibre et se trouble pour soudainement relâcher son emprise et redevenir limpide et douce. Elle est étonnante et imprévisible.
Comme une via ferrata : la corniche du Vieux Cade
On sort du bois de frênes, le canyon s’est franchement rétréci. Les arbres se raréfient, on se retrouve très vite à flanc de falaise.
Sur la roche, des pitons solides maintiennent des câbles en métal. On improvise une via ferrata, peut-être qu’on aurait pu prendre un baudrier et une longe pour s’accrocher et avancer avec plus de précaution. Trop tard. On se tient bien à la corde de fer à mains nues, on assure le petit, on le pare en avançant tranquillement. Le sentier dans la paroi est bien aménagé, on y circule correctement. Cependant c’est le vide en dessous et la force du courant qui inquiète et rend peureux. Il faut surveiller ses pieds, se donner des consignes par prudence et les respecter.
Tu te tiens, tu ne lâches jamais des deux mains, toujours un lien qui t’assure à la paroi. Alors, mes années d’escalade me reviennent en mémoire : sur des voies engagées avec mon casque et mes mitaines. Rah ! mes mitaines. Je les regrette un peu à ce moment-là. Sans compter que le fer est glacé et à force de s’agripper, les doigts tétanisent un peu, la paume de la main souffre.
Vers le Stix , un Verdon puissant et pur
Le bruit du torrent prend toute la place, il est assourdissant quand il se fracasse contre la falaise et se répète en écho en face. Tellement éclatant qu’il me sort de ma concentration de grimpeuse. Je regarde en contre-bas, c’est beau. Insolent et pur. On est passé sous la montagne, le soleil ne vient plus transpercer l’eau, seul le ciel bleu s’y reflète entre les remous. Le gris froid du Verdon semble plus profond ici. La nature n’est plus à taille humaine, elle se révèle et se grandit.
Un immense rocher planté au milieu semble aspirer l’eau. C’est intriguant car la montagne s’est creusée avec l’érosion et forme une caverne sombre. Comme une bouche noire ouverte, avalant des litres d’eau chaque jour. Je frémis en me rapprochant, il faut quitter la sente et dévaler la pente au travers de blocs rocheux. Une surprise m’attend, sur la droite, je découvre que le canyon est quasiment fermé.
En effet, par endroits, il n’y a plus qu’un ou deux mètres qui séparent les deux rives. De cette manière, le roc s’est transformé en œuvre d’art abstraite. Des formes aux courbes parfaites et aux pointes surprenantes. La beauté du relief est stupéfiante, je ressens en ce lieu mon infériorité face à la nature plus que nulle part ailleurs. Cela ne m’étonne pas d’apprendre plus tard que ce théâtre naturel a été baptisé le Styx (le fleuve qui mène aux enfers dans la mythologie). On observe plus bas de grandes vasques et marmites formées par le torrent au fil des siècles.
C’est à regret que je quitte ce paysage. L’air frais me rappelle à l’ordre, quand le soleil va se coucher, il fera glacial.
Remontée par le sentier Vidal
Heureusement, et pour ne pas oublier que nous sommes en Provence, un vague chaude chargée de romarin s’engouffre par moments. Il est temps de bifurquer à gauche. La remontée va être éprouvante mais fantastique. Le début du sentier Vidal est taillé à même la roche dans un mur vertical, il est étroit, sécurisé par une main courante, et haut d’une quarantaine de mètres. C’est une de mes ascensions les plus raides avec de nombreux passages aériens. Je ferme la marche pour prendre un peu plus le temps, ne rien oublier, profiter encore un peu des dernières minutes au plus près du Verdon. Je lui dis Adieu et à bientôt quand il n’est plus qu’un trait bleu qui serpente indéfiniment.
TOPO de la randonnée :
Chaque printemps c’est le même manège, on guette les premiers weekends de douceur, à la moindre petite fleur sur les arbres on sait que c’est le top départ. On prend la caisse et on roule à travers champs, on passe les vieux villages encore endormis par l’hiver. Ce n’est pas la porte à côté mais ça vaut le coup d’œil.
Le chemin de l’Imbut et la remontée par le sentier Vidal, offrent une randonnée exceptionnelle qui vous permet de découvrir le Verdon au cœur des gorges et du lit de la rivière. Des paysages extraordinaires vous attendent mais attention, cette randonnée reste difficile et certains passages sont à fleur de falaise.
Comment aller au Verdon ?
En venant d’Aiguines, dépasser le village en montant en direction de Comps-sur-Arturby sur la D71 (sur 14km).
Se garer au parking de l’hôtel restaurant Les Cavaliers. (P)
Randonnée détaillée :
A pieds, en partant du parking (1), prendre la direction d’Aiguines D71 jusqu’au vieux panneau en bois qui indique le départ de la randonnée en prenant le sentier des Cavaliers.
Descente par le GR99 jusqu’au Verdon. Dénivelé d’environ de 300m ( 30min).
En bas des gorges, prendre sur la gauche jusqu’à la passerelle de l’Estellier. Alors, laisser la passerelle sur la droite pour continuer sur cette même rive. (2)
Après avoir traversé le sentier en sous-bois, arrivent les premières difficultés avec des passages équipés de câbles qui surplombent les gorges. Rester vigilant, la roche est glissante et en léger devers par endroit. (3)
Ensuite, le sentier monte dans le bois pour parvenir au croisement du départ du chemin Vidal. (4) Possibilité de continuer jusqu’au Baou Béni (4b), le bout du monde. Attention cette partie de la randonnée est dite dangereuse et demande une certaine condition physique ainsi qu’une grande habilité. En famille, nous avons préféré ne pas faire cette dernière étape c’est pourquoi je ne peux vous en parler avec assurance.
De plus, sachez que si vous vous permettez quelques pauses agréables durant le parcours, vous n’aurez pas assez de temps pour pousser plus loin.
Le sentier Vidal est extrêmement physique, soyez prudent ! Par contre le panorama est spectaculaire. Nombreux passages câblés, échelle métallique, chemin en zigzag à très fort dénivelé.
Ce chemin doit son nom à un ingénieur qui l’a créé lors de travaux pour aménager le Verdon au début du vingtième siècle. C’était une voie de secours pour les ouvriers.
Attention : Ce circuit ne doit pas être fait en sens inverse, le sentier Vidal étant interdit à la descente.
Après environ 1h d’effort, vous débouchez sur la D71. (5) Marcher sur la route sur 20m, puis prendre le chemin à droite qui monte dans le bois. Continuer tout droit ce sentier champêtre jusqu’à l’intersection avec le GR pour retrouver le parking des Cavaliers.
Informations pratiques
- Ne pas faire cette randonnée par temps de pluie, ni l’hiver, le sol étant très glissant.
- Eau + casse-croûte + chaussures de randonnée : obligatoire !
- Carte au 1/25000 utile.
- Vous pouvez prévoir un baudrier ou une corde avec deux mousquetons, afin de s’assurer le long des mains courantes, surtout avec des enfants.
Durée moyenne: 6h
Distance : environ 10km
Point haut : 943m / Point bas : 533m
Difficulté : Très difficile
Retour point de départ : Oui
Région : Alpes de Haute Provence
>> Vous êtes débutant en randonnée, vous préférez partir avec un guide accompagnateur, j’ai ce qu’il vous faut :
Randonnée sur le Sentier de l’Imbut avec un guide >
Pourquoi le Verdon est bleu et à d’autres moments pourquoi le Verdon est-il vert ?
La couleur turquoise du lac de Sainte-Croix est due aux fonds argileux.
Le Verdon est vert lorsque les courants sont moins vifs et le fluor et des micro-algues plus présents, lui donnant cette couleur émeraude.
Dans les eaux vives, les rochers gris blanc et l’argile du sol confère à l’eau une teinte turquoise très claire.
…alors pourquoi le Verdon ?
justement l’origine du nom de cette rivière vient de sa couleur particulière, dérivé du latin viridum, « lieu verdoyant ».
Comment visiter le Verdon ?
Le Verdon en famille :
- Visiter Moustier-Sainte-Marie (manger de la glace artisanale Fraise Menthe).
- Monter à la Chapelle Notre-Dame de Beauvoir pour voir l’étoile de plus près et admirer la vue sur le village et sur le Parc naturel régional du Verdon.
- Se baigner au lac de Ste Croix.
- Remonter le début des Gorges du Verdon en bateau électrique ou en pédalo avec toboggan ou louer un canoë.
Le Verdon aventure :
- Découvrir des chemins de randonnées pour des vues exceptionnelles au cœur des Gorges du Verdon.
- Faire une descente des Gorges du Verdon en aqua rando avec des professionnels pour vous guider.
- Approcher les parois du Verdon en escalade sur des voies équipées.
- Faire du canyoning avec le matériel adapté.
Les LIENS pratiques pour randonner dans le Verdon :
– le Topo Guide « Le Verdon à pied » par la Fédération Française de Randonnées
– la carte IGN du Verdon – La référence pour explorer les Gorges du Verdon
Où dormir aux gorges du Verdon ?
Les Gorges du Verdon est un site naturel très sauvage, vous ne trouverez que très peu d’hébergements au plus proche du canyon à La Palud-sur-Verdon. Vous devriez regarder du côté des petits villages comme Moustiers-Sainte-Marie, Riez ou encore Castellane.
Si vous voulez vivre en symbiose avec la nature et être au plus près des activités sportives du Verdon parc, choisissez le camping. Il y en a plusieurs autour du verdon.
Si je n’habitais pas la région, je choisirai Le Camping de l’Aigle d’une part pour sa situation géographique entre le Lac de Sainte Croix et l’accès aux plus belles randonnées des gorges du Verdon. Et d’autre part, pour ses mobil-home écolos Coco Sweet. Un hébergement insolite mais confortable : sorte de tente améliorée, toute équipée avec un vrai lit. Et en plus c’est un habitat à l’impact minimum sur l’environnement qui se fond dans la nature. Du glamping (contraction de Glamour et Camping).
Quel camping Verdon et alentours ?
Et d’ailleurs, si vous aimez le camping en tente ET le confort, vous pouvez choisir un des campings qui propose des mobil-home de ce type et cela dans toute la France.
Voici deux campings à la position stratégique par rapport aux activités possibles dans le Parc National du Verdon.